#Working3D : six questions pour comprendre le métier d’examinateur de brevets en impression 3D
Dans le cadre de notre série d’articles #Working3D, dans laquelle nous analysons les différents métiers du secteur de la fabrication additive, nous avons eu l’occasion d’étudier plus en détail les activités liées aux brevets d’impression 3D. Nous avons notamment interviewé Monica Lozza, représentante de l’Office européen des brevets (OEB), qui nous a expliqué en quoi consiste sa profession d’examinatrice de brevets d’impression 3D. Nous lui avons demandé de nous décrire son travail quotidien, les qualifications qui lui ont permis d’accéder à cette fonction et de donner quelques conseils à ceux qui souhaitent se lancer dans la même profession.
3DN : Pouvez-vous vous présenter et nous en dire plus sur l’activité de l’OEB ?
Bonjour, je m’appelle Monica Lozza et je travaille comme examinatrice de brevets à l’Office européen des brevets (OEB) à La Haye. L’OEB est l’autorité qui délivre les brevets pour l’Europe aux inventeurs, aux chercheurs et aux entreprises du monde entier. Il s’agit de l’une des plus grandes organisations de service public en Europe, avec environ 6 300 employés, dont plus de 4 000 scientifiques et ingénieurs travaillant en tant qu’examinateurs de brevets.
Nous travaillons dans tous les domaines technologiques et je fais partie d’une équipe de dix collègues qui se consacrent à l’impression 3D de matières plastiques. Mon domaine d’expertise est celui des machines et des procédés d’impression 3D de matières plastiques, et je m’occupe donc spécifiquement des demandes de brevet déposées auprès de notre office dans ce domaine. Dans d’autres équipes, d’autres collègues se concentrent sur l’impression 3D métal, d’autres sur les aspects numériques de la technologie, et d’autres encore sur les matériaux (polymères, biomatériaux, etc.).
3DN : Quelle est la journée type d’un examinateur de brevets dans le domaine de l’impression 3D ?
Chaque demande de brevet est différente et, par conséquent, chaque journée est différente. Les demandes de brevet sont des textes et des dessins qui décrivent une invention. Nous commençons par un contrôle formel et effectuons ensuite des recherches dans nos bases de données, car nous devons déterminer si l’invention présumée est réellement nouvelle ou si elle existe déjà ailleurs dans le monde. Les brevets ne sont délivrés que pour des inventions techniques nouvelles, non évidentes et applicables industriellement. Notre travail quotidien combine donc expertise scientifique, recherche analytique et prise en compte des aspects juridiques de la propriété intellectuelle. Pour garantir une qualité optimale, chaque demande de brevet auprès de l’OEB est examinée par une équipe de trois examinateurs. En outre, si nécessaire, nous consultons des collègues qui peuvent disposer d’informations dans d’autres domaines d’expertise et nous communiquons avec les demandeurs pour aligner leur demande sur les exigences légales d’un brevet européen.
3DN : Quelles sont les qualifications requises pour exercer cette fonction ?
Pour devenir examinateur de brevets, vous devez être titulaire d’un diplôme dans une discipline scientifique ou technique, le minimum requis étant un master. Le diplôme doit être en rapport avec le domaine technique dans lequel vous souhaitez travailler. Par exemple, j’ai obtenu un diplôme d’ingénieur chimiste à l’école Polytechnique de Milan. Vous devez également posséder d’excellentes compétences linguistiques, car nous travaillons dans trois langues officielles : l’anglais, le français et l’allemand.
3DN : Quel est votre point de vue sur la situation actuelle du marché des brevets d’impression 3D en Europe et dans le monde ?
L’OEB vient de publier une étude sur les tendances mondiales en matière d’innovation dans le domaine de l’impression 3D, qui révèle que l’Europe et les États-Unis sont en tête de la course mondiale à l’innovation dans cette technologie. Nous avons observé une augmentation importante et rapide du nombre de demandes de brevets déposées auprès de l’OEB. Il y a beaucoup d’inventions provenant de grandes entreprises, mais aussi d’universités, d’instituts de recherche publics et de startups.
À titre personnel, je peux certainement confirmer cette forte croissance des demandes de brevet dans le domaine. Lorsque j’ai rejoint l’OEB il y a 15 ans, après des études universitaires et un passage dans l’industrie, j’étais l’un des trois seuls examinateurs de brevets dans le domaine de l’impression 3D. À l’époque, on ne parlait même pas d' »impression 3D » ou de « fabrication additive », mais de « prototypage rapide ». Cela montre le changement d’orientation de la technologie. Aujourd’hui, mon équipe compte plus de dix collègues et beaucoup plus d’examinateurs traitent des demandes dans d’autres domaines.
3DN : Quels sont les plus grands défis auxquels vous êtes confronté dans votre travail ?
En tant qu’examinateur de brevets, il est nécessaire de se tenir au courant des derniers développements. Dans le domaine de l’impression 3D, nous avons assisté à des progrès incroyables et nous devons tenir compte d’une forte croissance de l' »art antérieur » (toutes les informations accessibles au public avant la date de dépôt de la demande de brevet), qui peut être rédigé dans n’importe quelle langue, y compris le japonais, le chinois et le coréen. À cette fin, l’OEB dispose de vastes bases de données et d’outils de traduction qui permettent d’effectuer des recherches complètes et précises. Nous devons également être cohérents dans l’application du droit européen des brevets à toutes les demandes, car le résultat de notre travail doit être prévisible pour que les brevets soient utiles aux entreprises et à la société.
3DN : Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite faire ce métier ?
Outre les exigences minimales que j’ai mentionnées plus haut (diplôme scientifique/technique et connaissance des langues), il faut avoir le sens du détail et un intérêt pour l’innovation. Vous devez être à l’aise avec d’autres langues et communiquer clairement. Dans mon cas, l’expérience professionnelle a certainement permis d’ajouter des connaissances pratiques à ma formation universitaire, mais de nombreux collègues ont commencé à travailler pour l’OEB directement après l’université. L’environnement de travail est très international, stimulant et inclusif : les femmes intéressées par la science et la technologie devraient envisager de poser leur candidature à l’OEB !
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*Crédits de toutes les photos : European Patent Office